À Tina, belle chatte grise

Publié le 17 Mai 2019

.

Depuis dix-sept ans son regard retenait tout, de nos faits et gestes.

Nos souvenirs se sont étoilés un jour de mai quand son souffle s'est éteint.

Les grillons chantent fort,  et les chats sont si calmes
- signe que Tina était d'une présence bouleversante.

Après les larmes, grosse était la fatigue et le sommeil
bienvenu m'a encore une fois fait retrouver ma mère,
vaillante et lucide. Qui détient la vérité : est-ce le jour,
est-ce la nuit, ou les deux se liguent-ils pour restituer
l'image de l'intégrité que notre peu de foi coupe
et divise?
Le féminin en nous considère la situation entière
il ne retranche rien à la réalité et comble les vides
d'amour. À quoi servent les larmes qui ne tracent
aucun chemin de mots quand la pensée-buvard
refuse de garder les souvenirs ? Les malédictions
liées à notre condition de vivants - une des formes
du souffle sur Terre - l'auteur pense les cerner mais
quand l'épreuve arrive, le mental se rebiffe et
chiffonne les poèmes, ces superflus à l'encre
dé(li)bile.
Il y a des boules de papier
plein ma corbeille à échecs
et des larmes qui couleront
à chaque évasion de tristesse

Et l'oeil du chat est le réceptacle
de nombre de ces chagrins qu'il
sait saisir et disperser alors
que superbe il garde son
mystère (auprès de nous ou sous terre)

.
Carmen P.
Tableau : Le jugement de Salomon. Raphaël.

Rédigé par Carmen Atonati

Publié dans #poésie

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M
Même ressenti qu'Alain. Tes mots ont fait remonter le souvenir de mon chien , mort exactement un an après mon père. Un animal merveilleux.<br /> Nous ne l'avons pas remplacé.
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A
Carmen, ton texte m'a rappelé la mort et l'enterrement de ma chienne adorée. Je n'avais que dix ans et le monde s'écroulait. Comme tu l'exprimes, la poésie paraît bien vaine, mais tu continues à chercher les mots, et c'est tant mieux.
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C
Je vais peut-être parvenir à envoyer ma réponse au bon endroit ! Je disais que j'allais faire mienne cette "clause du chat" ! :)
C
On se dit alors qu'on ne voudra plus jamais accueillir un autre animal. Cette année j'ai perdu ma colombe qui a vécu plus de 30 ans, et maintenant, Tina. Quand mon fils aîné a perdu son premier animal familier, il avait 10 ans, il a décrété qu'il ne s'attacherait plus à aucun autre animal et il s'y est tenu. Je cherche les mots qui eux ne redoutent pas le temps et qui restent cependant pour moi une énigme. Bon dimanche, Alain.
M
La puissance du chat vient du fait que ce sont ses yeux, ses mouvements seuls qui parlent. La vérité est mutique, l'amour est silence doré, la douleur est contemplation ; laissons chanter les grillons, qui savent l'indicible...
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C
Je remets ma réponse ici !<br /> Je crois que je vais retenir et faire mienne cette "clause du chat" ! Amitiés
C
Je crois que je vais retenir et faire mienne cette "clause du chat" ! Amitiés.
A
Je suis grandement d'accord avec ta dernière phrase, Carmen. Et je souhaite même que les mots demeurent énigmatiques...Bonne fin de week-end.
C
... Personne ne tenterait d'enseigner la géométrie à son chat. Une telle tâche nous semble bien au-dessus de ses capacités cognitives. Comme celui du chat notre cerveau a ses limites. Ainsi faut-il nous attendre à être dépassés par la réalité. À nous sentir submergés par une sensation d'inquiétante étrangeté qui marque la limite de ce qu'on appelle aujourd'hui notre "zone de confort". À chaque fois que cela m'arrive, je pense aux yeux verts de mon chat. Cette attitude m'a servi à de nombreuses reprises." Plus loin, il dit : "Je pense alors à l'étrangeté du monde telle que je l'ai perçue dans le yeux de mon chat. Ainsi ai-je accordé à cette pensée un compartiment dans ma tête. Un second plan où elle persiste, vigilante, dans mes réflexions. Comme un garde-fou qui me tient à distance de la tentation des certitudes et de la confiance absolue dans les raisonnements. Ce compartiment s'appelle pour moi : la clause du chat."
C
Les grillons chantent juste, aux heures qui sont les leurs. Le poète n'a que ses mots et les mêle comme couleurs pour dire ses états d'âme. Si un lieu condense le mystère c'est bien le regard du chat, et comme par hasard hier soir j'ai lu dans Le banc du temps qui passe d'Hubert Reeves un passage où il parle du regard du chat : "Je voyais le mystère du monde se refléter dans ses yeux : là, devant moi mais hors de portée